ne pourraient lui être unies, il n’y a que des idées qui peuvent être les objets immédiats de l’âme.
Or, les idées qui nous représentent ou plutôt qui nous présentent les choses matérielles, même si ces choses n’existent pas, sont des déterminations de l’idée d’étendue, idée claire qui est le principe d’une infinité de propriétés parfaitement connaissables en elles-mêmes, et cette idée d’une étendue infinie est une idée nécessaire, immuable, ineffaçable de notre esprit, comme celle de l’Être. L’esprit ne peut s’en séparer, ni la perdre de vue. Et en même temps qu’il connaît clairement ce qu’elle comprend et qu’il la juge ainsi pleinement intelligible, il ne peut la comprendre, en raison de son infinité : elle lui est incompréhensible. Preuve d’ailleurs que cette idée d’étendue est autre chose et infiniment plus qu’une modification de son être, puisqu’elle le passe infiniment. L’étendue intelligible, — intelligible en même temps qu’incompréhensible, — est l’objet immédiat de notre entendement. C’est de cette vaste idée que se forment toutes les figures intelligibles qui sont les divers corps : et ce sont ces figures intelligibles que nous voyons, même quand elles prennent des formes sensibles à nos yeux : car, si elles n’étaient pas les objets réels que nous percevons, nos sensations ne viendraient pas s’étaler, en quelque sorte, sur leur surface. Au fond l’intelligible seul peut être vu ; le sensible ne peut pas l’être : la vision illusoire du sensible n’est possible que par la vision réelle de l’intelligible.
Mais d’où viennent les idées que nous apercevons et avant tout l’idée d’étendue ? Il nous faut écarter, par les raisons que nous avons dites, toute explication par l’existence des choses et en particulier l’explication scolastique qui consiste à prétendre que les objets matériels envoient des espèces qui leur ressemblent. Il faut écarter également toute explication qui consiste à soutenir que l’esprit humain peut produire ces idées, ou les apporter avec lui en naissant : car,