les genres, les ordres, les classes n’existent que dans notre imagination. Est-ce à dire que les méthodes qui ont été données sur l’histoire naturelle en général ou sur quelqu’une de ses parties soient sans utilité ? Nullement. Mais « on ne doit s’en servir que comme de signes dont on est convenu pour s’entendre. En effet, ce ne sont que des rapports arbitraires et des points de vue différents sous lesquels on a considéré les objets de la nature ; et en ne faisant usage des méthodes que dans cet esprit on peut en tirer quelque utilité. » (P. 18-19.) — La classification propose des définitions ; mais on ne peut définir ici sans décrire exactement, et une description exacte porte aussi bien sur les apparences et les façons d’être extérieures que sur les fonctions intérieures. — Quant à l’ordre, il en est un qui est plus naturel que celui de tous les systèmes et de toutes les nomenclatures : c’est celui qui consiste à partir des divisions les plus générales telles qu’elles s’imposent à nos sens, à prendre ensuite les objets qui nous intéressent le plus ou qui sont les plus rapprochés de nous pour aller à ceux qui nous intéressent le moins et qui sont les plus éloignés. (P. 21.) — Doit-on conclure de là que Buffon verse dans l’empirisme et dans le nominalisme ? Pas tout à fait. Il est remarquable qu’il s’élève surtout contre l’idée que les classifications peuvent représenter l’ordre en soi de la nature. Mais, s’il juge indispensable avant tout les descriptions exactes, il n’estime pas qu’elles suffisent. « Il faut tâcher de s’élever à quelque chose de plus grand et plus digne encore de nous occuper : c’est de combiner les observations, de généraliser les faits, de les lier ensemble par la force des analogies, et de tâcher d’arriver à ce haut degré de connaissance, où nous pouvons juger que les effets particuliers dépendent d’effets plus généraux, où nous pouvons comparer la nature avec elle-même dans ses grandes opérations, et d’où nous pouvons enfin nous ouvrir des routes pour perfectionner les différentes parties de la physique. » (T. Ier, p. 27.)
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Apparence
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BUFFON ET LAMARCK