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Page:Delboulle - Anacréon et les Poèmes anacréontiques, 1891.djvu/12

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VIII PREFACE poussière de marbre brisé, cent quatre-vingts environ : nous avons donné la traduction des plus longs, de ceux qui offrent un sens complet et déterminé. Les autres très courts semblent presque tous provenir de chansons d’amour et de chansons de table. Mais le poète avait fait école : il eut de nombreux imitateurs,et si habiles, qu’un recueil de poèmes dits anacréontiques, conservé dans V Anthologie de Constantin Céphalas (XI° siècle), découvert par Henri Estienne en i554, et publié par lui, fut regardé comme l'oeuvre d’Anacréon lui-même. Il y eut bien, même à cette époque, quelques défiances, mais elles s’évanouirent devant l'admiration universelle. La critique moderne plus pénétrante a prouvé que ces pièces étaient des pastiches composés par des poètes alexandrins et byzantins : ce n’est pas en effet au VI° siècle avant l’ère chrétienne qu’on trouve chez les Grecs cette gentillesse maniérée, ces élégances un peu précieuses, cette versification monotone qui trahissent l’origine de ces poèmes; ce sont eux pourtant qui ont fait chez nous la gloire d’Anacréon, et, de nos jours même, a dit Egger, on a vu de bons esprits, comme Ambroise-Firmin Didot, soutenir leur authenticité. En 1832 ce faux Anacréon inspirait encore à Victor Hugo cette petite pièce de vers charmante :

Anacréon, poète aux ondes érotiques Qui filtres du sommet des sagesses antiques, Et qu’on trouve à mi-côte alors qu’on y gravit, Clair, à l’ombre, épandu sur l’herbe qui revit.