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LES FABLES

empruntées et prises dans le large sein de la nature ».(Jacques Olivier, Alphabet de l’imperfection et malice des femmes, 246, édit. 1876. — La 1re édition de ce singulier ouvrage est de 1617.)

Baïf a traité longuement le même sujet. Au lieu du Geai c’est le choucas qui se pare des plumes d’autrui.

Au temps jadis les oyseaux demanderent,
D’avoir un roy, puis entr’eux accordèrent
Pour commander d’eslire cet oyseau
Que Jupiter jugeroit le plus beau.
Ains que venir au lieu de l’assemblee
Tous les oyseaux vont a l’eau non troublée
Des ruisselets se mirer et baigner,
Et leur pennage agenser et pignier.
Le noir chucas, qui n’a point d’esperance.
Va cauteleux loing aval des ruisseaux,
Sur qui flotoyent les pennes des oyseaux,
Qui au dessus s’eplumoyent. Par malice
Va s’embellir d’un nouvel artifice.
En lieu secret, en un vallon ombreux,
Dans le courant, qui n’était guère creux,
Sur un caillou s’assiet et au passage
Gruette et retient le plus beau du pennage
De tous oyseaux qui plus haut se lavoyent.
Près des surgeons d’où les eaux derivoyent :
Prend le plus beau, plume a plume le trie
Avec le bec ouvrier s’en approprie.
Le joint, l’ordonne, et l’accoustre si bien
Que d’arrivée il semble du tout sien.