Page:Delille - L Homme des champs 1800.djvu/123

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Que j’observe de près ces clairons, ces tambours,
Signal de vos fureurs, signal de vos amours,
Qui guidoient vos héros dans les champs de la gloire,
Et sonnoient le danger, la charge et la victoire ;
Enfin tous ces ressorts, organes merveilleux,
Qui confondent des arts le savoir orgueilleux,
Chefs-d’œuvres d’une main en merveilles féconde,
Dont un seul prouve un dieu, dont un seul vaut un monde.
Tel est le triple empire à vos ordres soumis.
De nouveaux citoyens sans cesse y sont admis.
Cette ardeur d’acquérir que chaque jour augmente,
Vous embellira tout ; une pierre, une plante,
Un insecte qui vole, une fleur qui sourit,
Tout vous plaît, tout vous charme, et déjà votre esprit
Voit le rang, le gradin, la tablette fidèle,
Tout prêts à recevoir leur richesse nouvelle ;
Et peut-être en secret déjà vous flattez-vous
Du dépit d’un rival et d’un voisin jaloux.
Là les yeux sont charmés, la pensée est active ;
L’imagination n’y reste point oisive ;
Et, quand par les frimats vous êtes retenus,
Elle part, elle vole aux lieux, aux champs connus ;
Elle revoit le bois, le coteau, la prairie,
Où, s’offrant tout à coup à votre rêverie,
Une fleur, un arbuste, un caillou précieux
Vint suspendre vos pas, et vint frapper vos yeux.