Page:Delille - Les Jardins, 1782.djvu/90

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Part, et porte à travers les affreux bataillons
L’innocente vendange, et les riches moissons.
Chantre divin, je laisse à tes muses altières
Le soin de diriger ces phalanges guerrières ;
Diriger les jardins est mon paisible emploi.
Déjà le sol docile a reconnu ma loi ;
Des gazons l’ont couvert, et de sa main vermeille
Flore sur leur tapis a versé sa corbeille.
Des bois ont couronné les rochers et les eaux.
Maintenant, pour jouir de ces brillants tableaux,
Dans ces champs découverts, sous ces obscures voûtes
D’agréables sentiers vont me frayer des routes.
Des scènes à ma voix naîtront de toutes parts ;
Pour les orner enfin j’y conduirai les arts,
Et le ciseau divin, la noble architecture
Vont de ces lieux charmants achever la parure.

Les sentiers, de nos pas guides ingénieux,
Doivent, en les montrant, nous embellir ces lieux.
Dans vos jardins naissants je défends qu’on les trace.
Dans vos plants achevés l’œil choisit mieux leur place.
Vers les plus beaux aspects sachez les diriger.
Voyez, lorsque vous-même aux yeux de l’étranger