Page:Delluc - Monsieur de Berlin, 1916.djvu/91

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à-vis de lui. On a dû lui parler, comme à tout le monde, de ce qui s’est passé au château. J’avais bien dit que je lui plairais un jour, à cet ennemi.


J’ai connu bien peu de Françaises et je les ai connues bien mal. D’Ascain n’est pas celui qui me les fera connaître. J’ai causé un bon quart d’heure avec lui, familièrement, mais il est très distant et l’on n’est pas sûr que ce soit par respect : on dirait qu’il ne tient à rien apprendre de moi et à ne rien m’apprendre non plus. Ce genre de partenaires est toujours bien séduisant, sans doute parce que la conversation tire le meilleur de son charme des petits obstacles où elle se blesse à tout propos. Cet homme a une politesse indifférente qui doit irriter. Mais je le sais brillant et je le sens intelligent. Pourquoi me fâcher ? Je suis plus fort que lui, n’est-ce pas ?

Il dit m’avoir entendu jouer de l’orgue à Potsdam il y a quelques années. Je m’étonne qu’il n’ait pas tenu à me connaître dès lors. Dans ces moments-là, je suis toujours en goût de me faire des amis. Il me répond, je crois, qu’il craignait une déception, soit que l’homme fût inférieur au musicien, soit plutôt qu’il le dépassât, auquel cas il ne voulait pas amoindrir son impression de mélomane.