Page:Delphine de Girardin - Poésies complètes - 1856.djvu/108

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On dit  : « Vous avez tort ; c’est un homme léger,
Mais il n’est point méchant… »

                                                Oh ! puis-je me contraindre ?
Mais les hommes légers sont les seuls qu’il faut craindre.
Le vice est moins perfide : il choque la raison ;
Le dégoût qu’il inspire est un contre-poison ;
Il se nomme du moins… ; mais ce froid badinage,
Parfum empoisonné où flétrit le jeune age,
Ce dédain gracieux jeté sur la vertu,
Cet ennemi charmant, sans avoir combattu,
Triomphe !… et nous rions encor de sa faiblesse,
Quand sa main nous atteint et quand son fer nous blesse.
Nous ne reconnaisons le mal qu’après la mort.

Ainsi ma pauvre amie a vu flétrir son sort
Par cet homme léger, dont la froideur amère
Ne lui laissa chérir ni le ciel ni sa mère,
Sa mère ! qui mourut si jeune et par amour.

« Ta mère, mon enfant, lui disait-il un jour,
Elle était, comme toi, douce, mais un peu folle :
L’Empereur, ton parrain, était sa seule idole ;
C’était, dit-on, la mode alors… mais aujourd’hui,
Tu ferais bien, crois-moi, de moins parler de lui,
Après tous les propos qu’on a tenus sur elle…
Et cette ressemblance… Oh ! mais, tu deviens belle !…
Oui, je veux te mener au spectacle demain. »

Et puis il s’éloignait… et, passant son chemin,
Il laissait une enfant avec cette pensée :

« L’Empereur est mon père !… »

                                                 Ô faiblesse insensée !