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GÉRARD DE NERVAL

qu’ait écrit Rousseau, et cependant il tombe des mains dès la première page : si l’on pouvait haïr un homme que son malheur rend sacré, on haïrait le fils de l’horloger de Genève pour les turpitudes qu’il étale avec une naïveté qui touche de si près au cynisme ; on le haïrait de nous apprendre ce que nous ne tenions pas du tout à savoir, ses tribulations de laquais et ses indélicatesses d’amant, — qui éclaboussent son génie en tachant sa vie.

Je pousse si loin l’horreur de ces Confiteor publics, inutiles quand ils ne sont pas dangereux, que les Mémoires de Gœtlhe eux-mêmes ne trouvent pas grâce devant moi. J’avais pour le Jupiter de Weimar, si majestueux dans son impavidité de statue, un respect profond, quasi religieux ; il me plaisait de penser qu’il n’appartenait par aucun cordon ombilical à l’Humanité, qu’il contemplait du haut de son Olympe avec le sourire tranquille d’un Dieu qui se sait adoré. Le jour où j’ai lu ses Confessions, mon respect