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riel et l’insurrection des métis

abandonnés à eux-mêmes, victimes de dénis de justice répétés et ne comptant plus aux yeux du gouvernement. De là à un soulèvement il n’y avait qu’un pas, et ce pas fut vite franchi. La patience des Métis était à bout, leur confiance en Riel était immense, et celui-ci, qui passait presque pour prophète, résolut d’user de son ascendant pour lever l’étendard de la révolte, non avec la folle pensée de lutter contre tout le Canada, mais avec l’espoir d’obtenir par la crainte qu’il soit fait droit à toutes ses demandes.

Cette détermination était certes condamnable au premier chef, mais le gouvernement fédéral, de son côté, n’avait rien fait pour la prévenir. Et quand il se décida à accorder les premières satisfactions, il était déjà trop tard. Le 30 mars, une commission de trois membres était nommée pour s’enquérir, à bref délai, des réclamations des Métis. Mais déjà la poudre avait parlé, et la commission ne parvint sur les lieux qu’après la pacification.

La nouvelle de l’arrivée de la police montée, seule force publique chargée du maintien de l’ordre au Nord-Ouest, dans les paroisses habitées par les Métis, précipita le mouvement. Averti du fait et craignant pour sa sécurité, Riel convoqua en toute hâte ses partisans à Batoche, petit village situé sur la rive droite de la Saskatchewan du sud, et les détermina à la résistance. Pour les armer et les nourrir, il réquisitionna les armes, munitions et vivres qui se trouvaient dans les magasins des négociants, tout en demandant un état des livraisons qu’il entendait payer. En même temps, il laissait profaner l’église et persécuter les missionnaires, tout en affectant les dehors d’une grande piété. Faisant ensuite emprisonner quelques otages anglais, il constitua un gouvernement provisoire, sous la forme d’un conseil de douze membres, dont il fut le chef incontesté et absolu (18 mars 1885). Il prit le titre d’exovide et donna à son conseil celui d’exovidat.

Parmi ces membres on remarquait notamment Gabriel Dumont, Maxime Lépine, Philippe Garnot, Jackson. Ces deux derniers furent les seuls blancs associés par Riel à ses entreprises. Jackson, ex-apothicaire à Wingham, converti de la veille au catholicisme, devint secrétaire de Riel. Traduit en jugement, par la suite, il fut acquitté comme fou et enfermé comme tel dans une maison d’aliénés d’où il parvint à s’échapper. Max. Lépine, ancien député provincial au Manitoba, était