Page:Demangeon - Le Déclin de l’Europe, 1920.djvu/277

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’ouvrirait à eux ; mais on leur reconnaît à peine la qualité de citoyens ; quand ils sont revenus d’Europe dans les villes du Sud, on ne daigna pas les regarder alors que les rues se pavoisaient pour célébrer leurs camarades blancs. Ils ont vu en France comment les Français traitent leurs soldats de couleur ; ils ont vu qu’on les laisse s’y mêler à la vie nationale, qu’on les reçoit sans la moindre hostilité dans les cafés et les restaurants et que la règle des rapports communs est cette égalité familière qui fait oublier les différences et les préjugés. Les Nègres américains cessent d’être passifs ; ils veulent voir cesser l’injustice.

À ces raisons de sentiment et de dignité s’ajoute une raison économique qui a une grande force. Les Nègres comptent maintenant comme un élément essentiel dans la vie matérielle de l’Union. Du fait de la guerre, beaucoup d’émigrants européens qui fournissaient la grosse main-d’œuvre furent rappelés dans leur patrie. Pour les remplacer dans les mines et les manufactures, un fort mouvement de migration noire s’établit du Sud vers le Nord, migration spontanée sans chef, ni propagande, sollicitée par