Page:Denikine - La décomposition de l'armée et du pouvoir, 1922.djvu/50

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de ses conséquences ; d’ailleurs, la base juridique des trois actes n’était que trop branlante : l’abdication forcée de l’empereur Nicolas II ; son renoncement aux droits héréditaires pour son fils mineur, et, enfin, plus tard, le grand-duc Michel — qui n’avait pas accepté le pouvoir suprême — le transmettant au gouvernement Provisoire en signant un acte dans lequel il « priait » tous les citoyens de se soumettre à ce gouvernement.

Rien d’étonnant si « dans l’idée générale des contemporains de ce premier moment » — pour parler comme Milioukov, — « le nouveau pouvoir, créé par la révolution, succédait non aux actes du 2 et du 3 mars, mais aux événements du 27 février ».

Vers minuit, dans la nuit du 3 mars, l’empereur, après y avoir apporté quelques corrections, remit aux délégués et à Rouzsky deux copies du manifeste d’abdication.

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« En ces jours de grande lutte contre l’ennemi extérieur, qui, depuis bientôt trois ans, cherche à asservir notre patrie, Dieu a voulu envoyer à la Russie une nouvelle et pénible épreuve. Les troubles populaires, qui viennent d’éclater, menacent d’avoir une répercussion désastreuse sur la suite de la guerre opiniâtre. Le sort de la Russie, l’honneur de notre héroïque armée, le bien du peuple, tout l’avenir de notre chère patrie, exigent que la guerre soit, coûte que coûte, victorieusement menée jusqu’au bout.

« L’ennemi cruel concentre ses derniers efforts et l’heure est proche où notre vaillante armée, de concert avec nos glorieux Alliés, l’aura définitivement brisé. En ces jours décisifs de la vie de la Russie, nous avons considéré comme un devoir de notre conscience de faciliter à notre peuple l’union étroite et le ralliement de toutes les forces nationales afin d’atteindre au plus tôt la victoire. D’accord avec la Douma d’Empire nous avons reconnu qu’il était bon de renoncer au trône de l’État Russe et de déposer le pouvoir suprême. Ne voulant pas nous séparer de notre fils bien-aimé, nous remettons notre succession à notre frère, le grand-duc Michel Alexandrovitch, et donnons notre consécration à son avènement au trône de l’État Russe.

« Nous engageons notre frère à diriger les affaires de l’État en une union parfaite et indestructible avec les représentants du peuple, dans les institutions législatives et conformément aux principes qui seront élaborés par ces dernières, en en faisant un serment irrévocable pour l’amour de la patrie bien-aimée.

« J’appelle tous les fils fidèles de la patrie à remplir leur devoir sacré à son égard ; en obéissant au Tsar à l’heure pénible des épreuves nationales, et en l’aidant, de concert avec les représentants du peuple, à conduire l’État Russe sur le chemin de la victoire, de la prospérité et de la gloire.

« Puisse Dieu aider la Russie !

NICOLAS ».


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