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ces. Ils pénétrèrent, en effet, jusqu’au logis des souverains. Mais ceux-ci étaient bien gardés. L’éveil fut donné, les Bourguignons accoururent en foule, et les six cents héros, accablés par le nombre, périrent sans vouloir fuir.

Le lendemain, dimanche, l’armée bourguignonne descendit dans la ville. Arrivé sur la place de l’Hôtel de Ville, le duc de Bourgogne tira son épée en criant « Vive Bourgogne ! » À ce signal, le pillage commença : il ne tarda pas à être accompagné de scènes affreuses, car la fureur du soldat, s’animant par degrés, ne connut bientôt plus de bornes. Les bourgeois furent poursuivis dans leurs habitations, assommés, pendus aux arbres, aux barreaux des fenêtres. Ni les femmes ni les enfants ne furent épargnés. Enivrés de carnage, les assassins noyèrent leurs victimes par dizaines et par vingtaines dans la Meuse. Alors, un immense incendie fut allumé aux quatre coins de la ville : « Quand on veut chasser l’oiseau, on brûle le nid, » avait dit Louis XI. Quatre mille Limbourgeois vinrent achever, par la pioche et le marteau, la destruction de cette ville florissante : seules les églises et les maisons des prêtres restèrent debout au milieu de ce lamentable amas de décombres. Cependant sa vengeance n’étant pas encore satisfaite, le terrible duc lança ses cavaliers dans les bois à la poursuite des fugitifs et fit dévaster par le fer et par le feu tout le pays de Franchimont. Quarante mille personnes, dit-on, périrent dans ces abominables excès dont les auteurs furent frappés d’anathème par le souverain pontife.

Les Gantois, terrifiés par cette cruauté inouïe, sollicitèrent leur pardon. Leurs magistrats et les doyens des métiers, après une heure et demie d’attente dans la neige, furent reçus au palais de Bruxelles, en présence des ambassadeurs de dix-sept nations. Ils déposèrent aux pieds du duc leurs bannières et leurs chartes, et les précieux parchemins furent mis en pièces.

Charles le Téméraire, fils de Philippe le Bon, était doué de qualités rares : il était juste et loyal, mais orgueilleux, brutal et obstiné.

1. Sédition à Gand. — Lors de l’inauguration de ce prince à Gand, la commune réclama la suppression de l’impôt sur le blé, et la restitution des privilèges