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lippe l’interrompit : « Ce ne sont pas les États, dit-il, mais vous, vous, vous seul ! »

Enfin après les premiers troubles, ce fut encore à des Espagnols qu’il confia la répression. Il envoya dans nos provinces une armée espagnole sous le duc d’Albe, et cet homme, d’une cruauté insensée, fit planer la terreur sur le pays. Cent mille Belges avaient abandonné leur patrie au seul bruit de son approche ! De ces émigrés sortirent bientôt les héroïques vengeurs du sang versé.

3. Exécution rigoureuse des placards. — Mais la cause initiale de la révolution du XVIe siècle, ce fut l’introduction de la Réforme dans les Pays-Bas. Elle s’y infiltrait de partout, en-dépit des édits de Charles-Quint ; et les idées nouvelles se propageaient rapidement dans un pays « où l’instruction, dit Guichardin, était répandue dans les moindres villages ». Anvers renfermait des milliers de luthériens par suite de son commerce avec les villes protestantes de la Baltique : le calvinisme pénétrait par la frontière de France ; les jeunes nobles d’ailleurs allaient faire leurs études à Genève, le foyer du calvinisme.

Si l’Inquisition, sous Charles-Quint, avait durement poursuivi les hérétiques, on avait usé pourtant d’une large tolérance à Anvers, pour ne pas éloigner les marchands allemands et ruiner le commerce de la ville. Sous Philippe II, aucune considération ne put fléchir la rigueur des placards. Élevé en Espagne, ce prince y avait puisé des convictions religieuses profondes, qui n’admettaient nulle transaction. Dans ce pays, en effet, le dévouement au catholicisme s’était exalté au plus haut point, sous l’influence d’une lutte de sept siècles contre les infidèles, pour la défense de la foi chrétienne. Cette exaltation religieuse avait conduit à une intolérance farouche. Le tribunal de l’Inquisition, sous le nom de Saint-Office, y fonctionnait avec une rigueur effroyable contre les Juifs, les Maures et les réformés. La procédure était secrète ; les accusés étaient envoyés en grand nombre au bûcher, et c’était en grande pompe, au son des cloches, les dimanches et jours de grande fête, qu’avaient lieu les supplices — les auto-da-fé ou actes de foi.

Or, Philippe II approuvait pleinement le zèle affreux des inquisiteurs : « Si mon fils, disait-il un jour, avait encouru une condamnation du Saint-Office, je mettrais moi-même le feu aux fagots. » — « Je préfère ne plus