or ! ô mes deux aigles d’ivoire, qui portez à Zeus, fils de Kronos, l’enfant échanson ! … Que Kypris se réjouisse, puisqu’elle a son époux ! Pour nous, dès l’aurore, à l’heure de la rosée, nous irons en foule vers les flots du rivage, et, la chevelure déliée, les ceintures dénouées et les seins nus, nous dirons un chant éclatant. »
Mélange exquis d’une allégresse s’amusant et s’enivrant d’elle-même, sans lassitude et sans trêve, et d’une familiarité qui risque tout et sauve tout, tantôt rasant la terre et tantôt s’envolant a tire-d’aile.
Mais j’insisterai plutôt sur le côté réel de cette pièce. Il est plus difficile qu’on ne croit d’être vrai en poésie. On atteint plus aisément un idéal convenu que l’on ne trouve une expression nette et pittoresque de la réalité. Il est plus aisé de fabriquer une héroïne sur un modèle académique, que de faire vivre Praxinoa et Gorgo, les deux Syracusaines du poëte. Car ce sont bien les femmes grecques telles qu’Aristophane les a mises en scène, et un peu aussi les femmes de tous les temps, quand leur origine et leur éducation ne relèvent pas leurs idées ; bavardes, curieuses, médisantes, peureuses au moindre bruit, moqueuses au moindre prétexte, ce sont de franches commères, comme les commères de Windsor, immortalisées par Shakespeare. Bavardes, elles le sont à cœur-joie, chez elles comme dans la foule. Et c’est à bon droit qu’un étranger leur cric : « Taisez-vous, malheureuses, tourterelles babillardes. Elles feraient mourir tout le monde en parlant toujours la bouche grande ouverte. » Mais pour répondre,