Page:Des Essarts - Les Voyages de l’esprit, 1869.djvu/316

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« L’égarement à aimer en plusieurs endroits est aussi monstrueux que l’ignorance dans l’esprit. »

Ce ne sont pas nos pères de 1820 et de \ 830 qui nous ont donné de tels enseignements. Tout était solidaire devant leur conscience héroïque, l’amour et la liberté. Des hommes plus jeunes, de générations intermédiaires, nos aînés, ont travaillé de bonne heure à nous rendre la passion suspecte et à déguiser sous un vernis de ridicule sa formidable beauté. Combien, hélas ! se laissent prendre à ce piége grossier tendu souvent par de prétendus sages, inquiets pour leurs enfants de toute initiative et de toute responsabilité. Ils ne savent pas où ils inclinent les âmes dont on décourage la ferveur naissante. Ils ne les reprennent à la passion que pour les envoyer à la débauche.

C’est ainsi que la jeunesse, non contente d’ignorer la passion, arrive à méconnaître les joies ineffables du devoir, et que l’on est en droit de déclarer à nos contemporains que beaucoup d’entre eux ne savent pas faire d’eux-mêmes le plus relevé de tous les choix, celui d’une fiancée, de la compagne de toute leur vie. Durs reproches justifiés par des faiblesses quotidiennes ! Le mariage d’intérêt ne devient-il pas le rêve favori d’imaginations juvéniles ? Mais ici les nouvelles générations ne sont qu’à demi coupables. Est-ce la faute de tant de jeunes hommes si, dans l’âge où la conscience est le plus flexible, on leur a solennellement et dogmatiquement enseigné la doctrine des mariages à prime et des femmes qui sont des dots ? Et pourtant, croyons-le, dans la vraie jeunesse, cet amour, de tous