peut avoir quitté cette terre ingrate et s’être réfugiée dans quelque Paphos idéale ; mais, toujours présent, son mal sacré s’attache encore à plus d’une destinée humaine, et ceux qui le sentent et celles qui l’éprouvent s’en dissimulent en vain la torture insurmontable et l’irrésistible fatalité.
Notre admiration s’attarderait sur ces vers où l’amour a laissé sa sanglante et lumineuse empreinte, mais nous devons, ou plutôt nous voudrions suivre Théocrite dans toutes les parties de son œuvre. Peutêtre est-il temps de signaler quelques poëmes mythologiques où ce talent trahit de réelles défaillances, où l’on voit des lacunes dissimulées par un art infaillible. Poëte des dieux et des héros, Théocrite nous plaît beaucoup moins que lorsqu’il se donne franchement à l’humanité ou à la nature. Vainement il s’essaye à rivaliser avec Hésiode. Ce n’est pas au poète d’un age nécessairement sceptique qu’il appartient de redire les légendes des âges robustes et crédules. Le temps n’est plus où les dieux se mêlaient aux hommes, où partout on sentait leur présence et comme leur frémissement. Le merveilleux est trop loin des regards et du souvenir pour qu’un poëte, fût-il Théocrite, puisse échauffer son cœur à ce soleil pâli qui s’incline vers la sombre mer. Non ! la mort de Penthée, les travaux d’Hercule, ne peuvent plus se chanter à Syracuse ou à Alexandrie. La science et le talent ne manquent point aux poëtes nouveaux, mais ce ne sont que des poètes. Pour de tels sujets il fallait des poëtes-prêtres, interprètes inspirés d’une théologie naissante. Sans doute les vers