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Page:Des Essarts - Les Voyages de l’esprit, 1869.djvu/47

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d’un seul lettré, sauf l’estime d’un seul homme de goût.

La comédie que nous signalons pourrait s’intituler, comme au temps des affiches les plus compliquées : « Le Dernier Mot du Réalisme, ou le triomphe des Illettrés, » car ce ne sont plus comme autrefois des lettrés mais bel et bien des ignares qui triomphent sur toute la ligne. Nous avons affaire à des conquérants d’une heure qui ont l’exubérance de la prospérité comme l’insolence de la victoire, et qui groupent autour de leur char des admirateurs naïfs et des imitateurs qui se croient habiles et ne seront peut-être qu’imprudents. Le ramas de ces imitateurs grossit ; nous les retrouvons à tous les coins de rue, et voilà pourquoi nous venons ici constater et discuter l’avénement et le succès de la nouvelle École.

Cette École nous devra son nom ; quoique nous ne comptions pas sur la reconnaissance, nous tenons à cœur de lui servir de parrain. Aussi l’avons-nous baptisée « l’École de l’ignorance. » Et jamais nom ne fut plus intimement lié à ceux qu’il désigne. Il ne s’y applique pas, il y adhère, il y incruste. Voilà l’École tout entière. Depuis le plus bruyant jusqu’au plus humble des adeptes, tous font profession d’ignorance : dans le choix des sujets qu’ils traitent, dans la manière de les traiter, et, ce qui est plus fâcheux, dans le jugement qu’ils prétendent imposer au public et dans les théories qu’ils étalent devant lui. Ils sont tous ignares, chacun selon son tempérament, ignares avec délices, comme Byron était humaniste, comme Goethe