Page:Des Essarts - Les Voyages de l’esprit, 1869.djvu/61

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l’écho des jours anciens ; il illumine tant le passé que le présent de la France poétique. Ce simple mot en tête d’un ouvrage, et soudain le secret des siècles semble se révéler à notre intelligence en même temps qu’à nos yeux ; tout l’enchaînement sacré de la tradition se déroule devant nous, et à première vue se trouve établie comme une filiation glorieuse entre nos poètes de race gauloise et leurs aïeux d’Attique ou d’Ionie, parenté transmise à travers les siècles et qui va d’Anacréon à Ronsard, et qui descend d’Euripide à Racine !

Sachons encore apprécier tout ce que ce mot d’anthologie a de charmant. Il y a dans ces syllabes engageantes toute une invitation a la promenade à travers un jardin peuplé de roses qui ne se fanent jamais et de lilas qui ne sont point éphémères, parmi des plantes souples comme des cygnes et des arbres sveltes comme des héros. Ce n’est plus ici le bosquet idéal de la Grèce, où les Muses ont fait courir les ondes les plus transparentes sous les plus frais ombrages ; mais dans ce verger des Gaules s’est élancée du sol natal, à chaque saison renouvelée, une floraison tout aussi abondante que celle dont se réjouissait Planude, plus mélangée sans doute, mais en revanche plus variée, et ne le cédant à sa rivale ni en couleurs éclatantes ni en parfums savoureux.

C’est surtout cette richesse poétique de la France que l’anthologie vient mettre en lumière, richesse ignorée du public, souvent méconnue par les lettrés. Que de fois dans la conversation ou même dans les