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Page:Des Monts - Les Legendes des Pyrenees 3e, 1876.djvu/111

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des chevaux de son bien-aimé et son petit cœur battait bien fort dans sa jeune poitrine.

Un soir de novembre enfin que la flamme tout hérissée de sinistres langues de feu, semblait happer avec bonheur la suie de la cheminée ; que le rouet des bonnes vieilles et la langue des jeunes filles babillaient à qui mieux mieux ; que quatre ou cinq vieux paysans, assis en cercle, pipe à la bouche, berret sur l’oreille, jambes et bras croisés, s’entretenaient gravement du maire et du curé de la commune ; que quelques jeunes gens enfin, entre nombreuses parenthèses d’œillades et de baisers, racontaient des histoires à donner le frisson, des histoires sombres comme l’enfer et longues comme une nuit d’insomnie.

Tout à coup un homme entra… — c’était le facteur… il apportait une lettre de Paris… Blondinette, la saisit en tremblant, car elle était cachetée de noir… elle l’ouvrit avec résignation…

Son ami, son frère, l’unique objet de ses pensées, son Raoul adoré venait de mourir sans l’avoir à son chevet pour lui fermer les yeux !…

L’imagination de feu du jeune poëte avait fini par faire éclater le vaste foyer de son intelligence, et en quelques jours seulement une fièvre brûlante avait fait un cadavre de ce qui était cette force, de ce qui était cette vie, cette jeunesse…