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Page:Des Monts - Les Legendes des Pyrenees 3e, 1876.djvu/156

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trop pauvre pour avoir ni châteaux, ni villas ; trop blasé des fêtes champêtres pour y trouver le moindre charme, il donne à l’imprévu le soin de le distraire, et s’en va demander aux villes thermales leurs souvenirs et leurs romans d’un jour.

Il y a quelques années donc, je me trouvais aux Eaux-Bonnes, quand un soir que je venais de lancer à l’air les dernières bouffées d’un excellent puro, mes regards, après s’être promenés du haut d’un des balcons de l’hôtel de France où j’étais descendu, sur les sublimes horreurs de cette mystérieuse et grande nature, que la lune argentait de ses pâles lueurs, plongèrent machinalement tout à coup dans l’intérieur d’une chambre voisine dont les fenêtres se trouvaient ouvertes.

Assis à une vaste table, couverte de morceaux de musique et de volumes épars, un grand jeune homme blond y concentrait ses regards avides sur un portrait de femme, idéal, frais et pur, tel qu’en voient les imaginations de quinze ans dans leurs rêves les plus dorés, tel qu’en eût rêvé Lamartine, dans ces heures d’inspiration divine où son génie créait Laurence et Daïdha.

Rien qu’à la manière dont il promenait sa main sur son front large et rêveur et dans les longues boucles de sa chevelure d’or, on devinait le poëte ; et c’en était un, en effet, mesdames ; un, dont