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Page:Des Monts - Les Legendes des Pyrenees 3e, 1876.djvu/256

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les murmures de ces grandes tiges ondoyantes qu’on retrouve partout au bord de l’eau. C’est la solitude dans tout ce qu’elle a de plus imposant et de plus majestueusement triste ; la solitude telle que la rêvait O’Berman et telle que Bernardin de Saint-Pierre nous l’a peinte dans les sublimes pages de son sublime ouvrage. Imaginez-vous une vaste nappe d’eau, enfermée de toutes parts entre de hauts rochers comme dans une immense coupe creusée par la main des géants, et sculptée par les doigts des fées, et dans cette onde diaphane et nacrée d’une transparence si bleue qu’on dirait d’un fragment d’azur tombé du ciel, pas un frémissement, pas une ride, pas un pli, un véritable miroir liquide. Mais que par exemple le moindre souffle s’élève, et vous verrez aussitôt cette surface naguère encore si unie et si paisible, s’agiter, se couper d’ondes lumineuses, s’enfler de petites vagues. Grâce aux mille rayons qui lui pleuvent du ciel pour se venir briser sur les pointes de ces flots légers, elle s’éclaire de vifs et chauds scintillements, s’irise de clartés changeantes, se couronne de diamants et de perles humides. C’est merveille de voir ainsi le lac bleuir ou miroiter selon les souffles du vent ou les caprices des rayons, et l’on ne sait que préférer de la molle transparence de sa nappe immobile ou du vif scintillement de ses