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EPITAPHES

1.


PAssant je ne dy point quelle a esté ma vie :
Car ma guerriere main l’escrit en plusieurs lieux,
Non seulement du stil sur l’escorce polie,
Mais en tous les esprits sagement curieux.

Je ne diray nom-plus la mort infortunee
Qui trop hastivement tranche mon dernier fil.
La mort est le recueil de toute chose née,
Un fillet dure moins quand il est plus subtil.

Je n’ay senti la mort : on ma bien veu paroistre
Ainsi que le Soleil doucement esclairant,
Qui nous semble en un jour naistre, grandir, descroistre,
Puis au sein de Thetys aller soudain mourant.

Mais le matin suivant sa belle face claire
Enflamme l’orison, chassant de toutes pars
La tenebreuse nuit, qui craint de se desfaire,
Et suit comme Python le feu de ses regards.

Ainsi est il de moy : car mon ame vivante
Reluit dedans les cieux d’un esclair nompareil,
Et de mon corps massif la despouille nuisante,
Estoit ceste Thetys estouffant mon Soleil.

Si entre les mortels une immortelle fame
Bien-heure les esprits, je ne me plains de voir