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HUIT FEMMES.

autres. Que cette vie doit être douce, plongée au fond d’un arbre frais !

» Je le dis, car j’ai vu un oiseau, naviguant sur la mer éclatante, raser l’écume des flots, et retourner mouillé sur sa branche au soleil. Qu’il est heureux de voler à sa volonté, comme nous dans nos rêves, sur des aîles fortes et souples à travers l’aurore, pour regarder en face le soleil levant ! Qu’il est heureux de percer comme une flèche l’espace sans bornes, de franchir le nuage d’argent et de chanter tout haut dans l’asile du tonnerre, d’étendre ses plumes avec une joie sauvage sur les hautes montagnes pleines de la voix des vents !

» Que ne m’avez-vous donné les ailes d’un oiseau, ma mère, puisque je n’ai ni la maison, ni le rang, ni le sol de mes pères ! »

Ainsi l’automne arriva. Mon platane refroidi répandit ses feuilles, qui s’envolèrent foulées aux pieds des passans. L’hiver nous enchaîna tous, chacun de notre côté, eux contens, moi rêveur.

Vers le soir, je savais régulièrement qu’il était cinq heures aux coups précipités du marteau mêlés à la sonnette[1].

  1. À Londres, le maître de la maison frappe et sonne en même temps.