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HUIT FEMMES.

J’ai toujours en moi sa figure désolée quand il sortit, m’abandonnant à ma destinée, qu’il pressentait fatale : c’était la première fois que j’en décidais moi-même, et je la remis à Dieu seul, n’ayant plus d’autre maître que lui.

Je partis à minuit. Quand il fallut se séparer de moi, la veuve ne put s’y résoudre. Elle renvoya au logis ses domestiques qui étaient de confiance, et prit son parti de me conduire l’espace de quarante-cinq lieues, qui sépare les deux îles.

En me sentant enlever par les matelots du bâtiment qu’il fallait aller rejoindre au milieu de la rade, j’avais mis ma main sur mes yeux, ne pouvant soutenir les larmes de cette aimable femme. À ma grande surprise je la retrouvai dans le canot, assise près de moi, calme et sa-