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l’enfant des champs-élysées.

heureuse mère, que la jeune fille se saisit de tous les vêtements de son frère pour s’en couvrir, et que, se jetant sur les genoux de sa mère surprise, elle lui cria : « Maman, embrasse-les sur moi comme tu les embrassais, je t’en prie ! » Une telle mère pouvait-elle ne pas comprendre une telle fille ? Nulle parole n’avait répondu à Rosa ; Rosa se sentit seulement étreinte au cœur qui se rouvrait tout grand pour elle, et, couverte de larmes brûlantes, trop longtemps contenues entre elles deux.

Ce fut un moment d’intelligence éternelle. Le beau visage enflammé de cette jeune fille redevenue un moment heureuse parut à sa mère une brillante prophétie ; elle osa la contempler à plein cœur et se rassasier de consolation. Rosa, d’un air tendre et réfléchi, lui dit :

— Pourquoi me cachais-tu que tu pleurais toujours ?

— Parce que je voulais te laisser grandir sans t’étouffer, ma chère fille. La douleur de tous les jours n’est pas de ton âge.