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Page:Desbordes-Valmore - L’enfant des Champs-Elysées, 1871.djvu/48

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l’enfant des champs-élysées.

Mais le petit Savoyard, enfonçant son bonnet sur ses yeux et tapant des pieds, mettait tout son entêtement montagnard à reprendre l’enfant, jurant qu’on le lui avait donné en garde, et qu’il en devait avoir soin comme de sa marmotte. L’officier l’enleva du marchepied pour l’interroger à distance avec plus d’ordre qu’il n’en pouvait obtenir au milieu de tant de monde rassemblé. Rosa saisit ce moment pour détacher les petits bras maigres de Michel passés autour du corps de sa mère ; car, par un mélange de peur et de joie, sans proférer une parole, il cachait ses sanglots sur la poitrine haletante dont il reconnaissait le souffle et la chaleur. Rosa, suppliante, conjura sa mère :

— Donne-le-moi donc un peu ! Je suis sa sœur enfin ! Qu’il me reconnaisse aussi, qu’il me dise bonjour !

— Michel se retourna vers elle, mais il ne la regardait pas. Il étendait devant lui sa main indécise qui cherchait à l’atteindre, quand Rosa, d’un cri déchirant, brisa le bonheur de sa mère.