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LOUISE LABÉ.

Tant que mes yeux pourront larmes espandre
À l’heur passé auec toy regretter ;
Et qu’aus sanglots et soupirs résister,
Pourra ma vois, et un peu faire entendre ;
Tant que ma main pourra les cordes tendre
Du mignart lut, pour tes grâces chanter ;
Tant que l’esprit se voudra contenter
De ne vouloir rien fors que toi comprendre ;
Je ne souhaitte encore point mourir,
Mais quand mes yeux je sentiray tarir,
Ma voix cassée, et ma main impuissante,
Et mon esprit en ce mortel séjour
Ne pouvant plus montrer sygne d’amante,
Priray la mort noircir mon plus cler jour.

— LOUISE LABÉ. —

Quand vous lirez, ô dames lionnoises !
Ces miens écrits pleins d’amoureuses noises ;
Quand mes regrets, ennuis, dépits et larmes
M’orrez chanter en pitoyables carmes,
Ne veuillez point condamner ma simplesse,
Et jeune erreur de ma folle jeunesse,
Si c’est erreur !

XLII.