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LES PLEURS.

Oui, l’orgueil m’a saisie, ô mon Dieu ! j’étais mère ;
Et la mère et l’enfant tendent les bras vers vous !

« Enfant, ne pleure pas. Voici des fleurs. Je t’aime.
Nous trouverons là bas, peut-être, un frais ruisseau ;
Tu dormiras content sous un jeune arbrisseau ;
Et peut-être avec toi j’y dormirai moi-même ! »

Ainsi la triste Agar, un enfant par la main,
De son cœur oppressé brise le long silence.
L’enfant rit à sa mère ; et, plein d’obéissance,
Cueille une fleur mourante et poursuit son chemin.
Ce chemin est brûlant ; le soleil le dévore :
L’enfant poursuit en vain, de chaleur obsédé,
L’arbre vert, l’ombre et l’eau ! Triste, il a demandé :
« Ce frais ruisseau, ma mère, est-il bien loin encore ? »

— « Là bas ! » répond Agar. — « Oh ! que c’est loin là bas,
Ma mère ! » — Elle se tait, détourne son visage ;
Du voile qui la couvre elle forme un nuage,
Comme un linceul mouvant où se traînent leurs pas.

Ses premiers pas, à lui, l’éloignent de son père !
Ô Sarah ! de ton fils le sort est plus prospère.