Page:Desbordes-Valmore - Les Pleurs, 1834.djvu/98

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
88
LES PLEURS.

Pour l’oublier aussi tu m’as donc bien aimée ?
Et le ciel, tout le ciel, n’était-ce pas ton cœur ?

Mais si Dieu n’a rien fait pour défendre qu’on aime,
S’il n’a pas dit l’enfer au monde épouvanté,
S’il n’est pas descendu pour l’annoncer lui-même,
L’homme est donc bien méchant de l’avoir inventé !

Ne crains pas : j’ai langui dans un feu qui dévore ;
J’ai porté ma couronne, et ma croix, et mes pleurs.
Je mourrai loin de toi… que puis-je craindre encore ?
Va, pour tous les tombeaux la nature a des fleurs.

Dieu n’a pas dit : « Brisez son fragile courage. »
Dieu fit le roseau faible, et l’air est son appui.
L’espérance, c’est Dieu, même au sein de l’orage ;
Je suis roseau, je tremble… et je cherche après lui !