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— « J’ose vous dire non ; cria le volontaire… »
Un chien les obligea tous les deux à se taire.


Quand le soleil couchant au parc les rappela,
Et que par flots joyeux le troupeau s’écoula,
L’agneau sous une haie établit sa cachette ;
Il avait finement détaché sa clochette.
Dès que le parc fut clos, il courut à l’entour,
Il jouait, gambadait, sautait à perdre haleine.
« Je voyage, dit-il, je suis libre à mon tour !
« Je ris, je n’ai pas peur ; la lune est claire et pleine :
« Allons au bois, dansons, broutons ! » Mais, par malheur,
Des loups pour leurs enfans cherchaient alors curée :
Un peu de laine, hélas ! sanglante et déchirée,
Fut tout ce que le vent daigna rendre au pasteur.
Jugez comme il fut triste, à l’aube renaissante !
Jugez comme on plaignit la mère gémissante !
« Quoi ! ce soir, cria-t-elle, on nous appellera,
« Et ce soir… et jamais l’agneau ne répondra ! »