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POÉSIES

CONTE D’ENFANT.


Il ne faut plus courir à travers les bruyères,
Enfant, ni sans congé vous hasarder au loin.
Vous êtes très-petit, et vous avez besoin
Que l’on vous aide encore à dire vos prières.
Que feriez-vous aux champs, si vous étiez perdu ?
Si vous ne trouviez plus le sentier du village ?
On dirait : Quoi, si jeune, il est mort ? c’est dommage.
Vous crîriez… De si loin, seriez-vous entendu ?
Vos petits compagnons, à l’heure accoutumée,
Danseraient à la porte, et chanteraient tout bas ;
Il faudrait leur répondre, en la tenant fermée :
« Une mère est malade, enfans, ne chantez pas !
Et vos cris rediraient : « Ô ma mère ! ô ma mère ! »
L’écho vous répondrait, l’écho vous ferait peur.
L’herbe humide et la nuit vous transiraient le cœur.
Vous n’auriez à manger que quelque plante amère ;
Point de lait, point de lit !… Il faudrait donc mourir ?
J’en frissonne ! venez ! ce tableau fait frémir.
Embrassons-nous, et moi je vais dire une histoire ;
Ma tendresse pour vous éveille ma mémoire.