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POÉSIES.

L’avez-vous rencontré, nymphe à la voix plaintive ?
L’avez-vous appelé ? s’est-il penché vers vous ?
Si son ombre a passé dans votre eau fugitive,
Nymphe, rendez-la-moi, je l’attends à genoux.
Mais jusqu’à l’oublier si vous êtes légère,
Mais si vous n’emportez que vous dans l’avenir,
Si l’image qui fuit vous devient étrangère,
De quoi vous plaignez-vous, nymphe sans souvenir ?

Quelle est cette autre enfant dans les saules courbée ?
De paisibles rameaux enveloppent son sort ;
Comme une jeune fleur dans la mousse cachée,
CommÀ l’abri des vents, elle dort.
L’orage aux traits brûlants ne l’a pas effeuillée ;
Loin du monde et du jour lentement éveillée,
Un jeune songe à peine ose effleurer ses sens ;
Elle rit… Qu’offre-t-il à ses vœux caressants ?
L’avez-vous rencontré, dites, belle ingénue ?
Sa voix, qui fait rêver, vous est-elle connue ?
Au fond d’un doux sommeil écoutez-vous ses pas ?
Non ! si vous l’aviez vu, vous ne dormiriez pas !
Dormez. Je vous rendrais et pensive et peureuse ;
Vous diriez : Dès qu’on aime on n’est donc plus heureuse ?
Je ne sais. Pour la paix de vos nuits, de vos jours,
Je ne saIgnorez-le toujours.

Mais de nouveaux sentiers s’ouvrent à ma tristesse ;
Je voudrais tous les suivre, et je n’ose choisir ;
L’espoir les choisit tous. Oh ! qu’il a de vitesse !
Il m’appelle partout… Où vais-je le saisir ?
Au pied de la chapelle où serpente le lierre,
Au pied Courbé par la prière.