Page:Desbordes-Valmore - Poésies, 1860.djvu/79

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Je vis ses derniers feux mourir sous un nuage ;
Et dans nos cœurs brisés, désunis sans retour,
Il n’en reste plus que l’image !





ÉLÉGIE


Il fait nuit : le vent souffle et passe dans ma lyre ;
Ma lyre tristement s’éveille auprès de moi :
On dirait qu’elle pleure un tourment, un délire ;
On dirait qu’elle essaye à se plaindre de toi ;
De toi, qu’elle appelait pour m’aider à t’attendre,
Qui la rendis si vraie, et par malheur si tendre !
Car tu ne peux ravir à ses accords touchants
Ton nom, toujours ton nom, qui courait dans mes chants.
Elle ne le dit plus, ce nom doux et sonore ;
Elle ne le dit plus, elle le pleure encore !
Combien elle a frémi, combien elle a chanté,
Sous les prompts battements de mon cœur agité,
Alors que, dans l’orgueil des amantes aimées,
Je confiais mon âme aux cordes animées !
Je croyais que les cieux ne donnaient tant d’amour
Que pour en pénétrer une autre âme à son tour !

Ah ! j’aurais dû mourir, doucement endormie
Dans cette erreur charmante où j’étais ton amie.
Devrait-on s’éveiller de ces rêves confus,
Pour y penser toujours, et pour n’y croire plus ?