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Révèlent par les yeux la présence des âmes,
Dans l’ombre se cherchant, mais étrangers entre eux,
Vous n’imaginez pas comme ils sont malheureux.
Les plumes dans le vent flottent moins ballottées
Que ces ombres en bas dans le doute emportées.
Qu’est-ce donc qu’une vie attachée à des corps
Dont un faible roseau peut rompre les ressorts !
Dieu qui les veut mortels a marqué leur visage,
Même les plus charmants, d’un douloureux présage ;
Mais distraits par des jeux vides et décevants
Ils deviennent vieillards sans cesser d’être enfants.
Jaloux de nos clartés qu’ils ne peuvent atteindre,
Allumant de grands feux, toujours prêts à s’éteindre,
Pour éclairer leurs jours et leur destin voilé,
Ils n’ont qu’un seul soleil et qu’un ciel étoilé !
Puis noyant leurs soucis dans des flots de paroles,
Dans un rire insensé, dans des colères folles,
Ces aveugles épars, pleins d’horreur pour la mort,
En la fuyant partout la donnent sans remord.
 
« C’est triste !… » C’est la terre. Et pourtant, mille charmes
Nous attirent sans cesse à ce pays des larmes.
On dirait que poussés d’un profond souvenir
Nous allons les guider au céleste avenir.
Et j’allais… Et pareils à des oiseaux nocturnes,