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UNE RUELLE DE FLANDRES.



À Madame Desloge, née Leurs.


Dans l’enclos d’un jardin gardé par l’innocence
J’ai vu naître vos fleurs avant votre naissance.
Beau jardin, si rempli d’œillets et de lilas
Que de le regarder on n’était jamais las.

En me haussant au mur dans les bras de mon frère,
Que de fois j’ai passé mes bras par la barrière
Pour atteindre un rameau de ces calmes séjours
Qui souple s’avançait et s’enfuyait toujours !
Que de fois, suspendus aux frêles palissades
Nous avons savouré leurs molles embrassades,
Quand nous allions chercher pour le repas du soir
Notre lait à la cense, et longtemps nous asseoir
Sous ces rideaux mouvants qui bordaient la ruelle !
Hélas ! qu’aux plaisirs purs la mémoire est fidèle !
Errants dans les parfums de tous ces arbres verts,
Plongeant nos fronts hardis sous leurs flancs entr’ouverts,
Nous faisions les doux yeux aux roses embaumées
Qui nous le rendaient bien, contentes d’être aimées !