Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, II.djvu/447

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4 & 5. Ie ne ſçay pas à qui vous perſuaderez qu’il importe fort peu de penſer que l’air ſoit tranſparent de ſa nature ou par accident ; mais ie ſuis fort aſſuré que cela n’eſt pas bien connoiſtre la nature de l’air. Et ſur ce 5 que, ayant eſté dit par vous, en voſtre premiere réponſe[1], que la matiere ſubtile eſt tranſparente en tant qu’elle eſt dans les pores de l’air, ie concluois que, cela ne luy eſtant qu’vn accident local, elle n’eſtoit donc pas tranſparente de ſoy ; vous dites à preſent que ie 10 conclus tout de meſme que, ſi de ce que vous auriez dit que le Roy a de grans reuenus en tant qu’il eſt Duc de Bretagne, ie tirois cette conſequence que, s’il n’eſtoit point Duc de Bretagne, il n’auroit donc point de reuenu. Ie vous répons que le reuenu du Roy luy eſt vn accident 15 diuiſible & externe, qu’il tire de pluſieurs lieux de ſon Eſtat ; mais la tranſparence eſt naturelle à la matiere ſubtile, comme vous accordez icy, & par conſequent elle ne la tire d’aucun lieu ou choſe externe, comme vous auiez dit en voſtre premiere réponſe ; c’eſt pourquoy 20 la comparaiſon cloche fort, & contient meſme le ſophiſme de la partie au tout ; d’où vient que la conſequence eſt fauſſe. Mais ſi i’auois dit : Louys XIII eſt ſouuerain de Bretagne en tant que Roy de France, il s’enfuiuroit que, s’il n’étoit Roy de France, il 25 ne ſeroit point auſſi fouuerain de Bretagne : car icy le mot en tant que eſt accompagné de la dependance eſſentielle ou neceſſaire, qui luy eſt propre, quand il eſt bien appliqué. Mais pour reuenir à noſtre matiere ſubtile, puiſque vous accordez 30 maintenant qu’elle eſt tranſparente de la nature, ou en ſa

  1. Cf. plus haut p. 213, l. 27-28.