Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, III.djvu/339

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vous connoiſtrez en peu de tems qu’il n a point du tout de fonds, qu’il a pluſieurs opinions extrauagantes, & qu’il taſche d’acquerir de la reputation par de mauuais moyens.

5 Quoy que Mr  de Roberual ne ſoit pas de ceux qui me fauoriſent, la verité veut pourtant que ie tiene ſon parti en ce qu’il dit d’vn grand arc, a ſçauoir que, ſi la fleche va auſſy viſte, lorſqu’elle commence a en partir, que lorſqu’elle commence a partir d’vn moindre, 10 elle ira plus loin. Mais notez que ie dis lorſqu’elle commence a partir ; car la corde du grand arc, pouſſant plus long tems cete fleche que celle du petit, fera qu’elle ira plus viſte auant qu’elle la quitte, ſi elle a eſté auſſy viſte au commencement, & en ſuite qu’elle 15 ira plus loin ; mais ſi on ſuppoſe que la fleche va egalement viſte au moment qu’elle s’eſloigne de la chorde du grand arc que du petit, elle ne pourra aucunement aller plus loin, & ainſy vous auez eu, ie croy, tous raiſon ; mais il a conſideré le moment 20 auquel la fleche commence d’eſtre pouſſée, & vous celuy auquel elle acheue d’eſtre pouſſée. Mais ie ne voy point pour quoy il conclud de cela que quod ſemel motum eſt, ſponte poſtea ceſſat moueri, etſi non impediatur.

25 Il eſt certain que la cheute d’vn fort grand poids aura bien plus de force, pour faire entrer vn pieu en terre, que le mouuement 100 fois plus ville d’vn poids qui n’aura que la centieſme partie de la peſanteur du premier, a cauſe qu’elle agira beaucoup plus long 30 tems[1].

  1. Page 212 ci-avant, l. 6 et suiv.