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��OEuvREs DE Descartes. 438-440.

��donc on dit qu'i'ii hâlon paroijl rompu dans l'eau, à caiife de la refraâion, c'elt de mefme que fi l'on difoit qu'il nous paroilt d'vne telle façon qu'vn enfant iugeroit de là qu'il eil rompu, & qui fait auiïi que, félon les preiugez aufquels nous fommes accourtumez désinolfre enfance, nous iugeons la mefme chofe. Mais le. ne puis demeurer d'accord de ce que l'on adioufle enfuite, à fçauoir que cet erreur n'ejl point corrigé par l'entendement, mais par le fens de l'attouchement ; car bien que ce fens nous fafle iuger qu'vn bâton elt droit, & cela par cette façon de iuger à laquelle nous fommes accoutumez dés noftre enfance, & qui par confequent peut élire np^lé^fen liment, neantmoins cela ne luffit pas pour corriger l'erreur de la veuë, mais outre cela il eft befoin que nous a3'ons quelque

381 raifon, qui nous enfeigne que | nous deuons en ce rencontre nous fier plutolt au iugement que nous faifons en fuite de l'attouchement, qu'à celu}' où femble nous porter le fens de la veuë ; laquelle raifon n'ayant point efté en nous dés nollre enfance, ne peut eftre attri- buée au fens, mais au feul entendement; & partant, dans cet exemple mefme, c'elt rentendemeni Icul qui corrige l'erreur du fens, & il efl impofiible d'en aportcr iamais aucun, dans lequel l'erreur vienne pour s'efirc plus fié à l'opération de l'efprit qu'à la perception des fens.

10. D'autant que les difilcultez qui relient à examiner, me font plutofi propofées comme des doutes que comme des objections, ie ne prefume pas tant de moy, que i'ofe me promettre d'expliquer alfez fuffifamment des chofes que ie voy élire encore aujourd'huy le fujet des doutes de tant de fçauans hommes. Neantmoins, pour faire en cela tout ce que ie puis, & ne pas manquer à ma propre caufe, ie diray ingenuëment de quelle façon il ell arriué que ie me fois moy-mefme entièrement deiiuré de ces doutes. Car, en ce fai- fant, fi par hazard il arriue que cela puilfe feruir à quelques-vns, i'auray fujet de m'en rejouir, & s'il ne peut feruir à perfonne, au moins auray-je la fatisfaction qu'on ne me poura pas accufer de prefomption ou de témérité.

I Lorfque i'eu" la première fois conclu, en fuite des raifons qui

382 font contenues dans mes Medita|tions, que l'efprit humain eft réelle- ment diflingué du corps, & qu'il efl mefme plus aifé à connoiftre que luy, & plufieurs autres chofes dont il efi là traitté, ie me fentois à la vérité obligé d'y acquiefcer, pource que ie ne remarquois rien en

a. Texte de la i° édit. : « i'eus ». Mais on trouve à Verrata : « p. 3Si, 1. 28, i'eus, lii'. i'eu, & de mefme par tout ailleurs ».

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