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III. 638-fi39. DXI. — Mars ou Avril 1648. 137

nement & du progrez de noftre diicours, qui les déduit des principes de la Fov qui ell obfcure, ou viennent des idées & des notions naturelles qui font en nous, qui, pour claires quelles foient, ne font que grof- 5 fieres & confufes fur vn i\ haut fuiet. De forte que ce que nous auons ou acquérons de connoilTance par le chemin que tient noftre raifon, a. premièrement, les ténèbres des principes dont il eft tiré, & de plus, l'incertitude que nous éprouuons en tous nos raifon-

10 nemens.

Comparez maintenant ces deux connoiifances, & voyez s'il y a quelque chofe de pareil, en cette percep- tion trouble j t!^ douteufe, qui nous courte beaucoup de trauail &. dont encore ne iouïfTons-nous que par

i5 momens après que nous l'auons acquife, à vne lu- mière pure, conftante, claire, certaine, fans peine, & toufiours prefente.

Or, que noftre efprit, lors qu'il fera détaché du corps ou que ce corps glorifié ne luy fera plus d'empefche-

20 ment, ne puiiTe receuoir de telles illuftrations & con- noiiîances directes, en pouuez-vous douter, puifque, dans ce corps mefme, les fens luy en donnent des chofes corporelles & fenfibles, & que noftre ame en a defia quelques vnes de la beneficence de fon Créateur,

2 5 fans lefquelles il^ ne feroit pas capable de raifonner? l'auQÙe qu'elles font vn peu obfcurcies par le meflange du corps; mais encore nous donnent-elles vne corî- noiffance première, gratuite, certaine, & que nous touchons de l'efprit auec plus de confiance que nous

3o n'en donnons au rapport de nos yeux. Ne m'auoûerez-

a. A savoir notre esprit.

Correspondance. V. iS

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