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200 Correspondance.

Baillet (Vie de Descartes, II, 341-342) ne fait que paraphraser le récit de Sorbière. La lettre d'Auzout lui sert d'abord à confirmer ce récit, puis à le compléter de la manière suivante :

« Les premiers momens de liberté que l'indisposition laissa à M. Gas- » sendi, furent employez à rendre la visite à M. Descartes, chez qui, après » s'être accusez mutuellement de trop de crédulité l'un envers l'autre, ils » s'excusèrent ensuite avec la même bonne foy sur le caractère de l'esprit B philosophique, qui traite quelquefois avec trop d'indifférence ce qui » s'appelle éclaircissemens nécessaires sur des sujets de mécontentement. » [En marge : Lettr. MS. du 8 Août 1689, de Rome par M. Auzout.] » M. Descartes retourna encore depuis chez M. Gassendi, avant son dé- » part pour la Hollande. Ils renouvellérent de la meilleure foy du monde n les protestations de l'amitié éternelle dont ils avoient, pour le dire ainsi, >> prêté le serment entre les mains de Monsieur l'Abbé d'Estrées, et se » séparèrent dans une résolution sérieuse de ne plus écouter les sugges- » lions intérieures de leur jalousie, qui ne devoit plus être qu'une louable » émulation, pour les exciter davantage à fournir la carrière qu'ils cou- » roient avec tant de gloire et de succès par des routes différentes. » (Baillet, II, 342-343.)

Mais surtout Baillet invoque la lettre d'Auzout pour rectifier la date de la réconciliation : elle eut lieu l'été de 1648, et non pas, comme Sor- bière tentait de le faire croire, en 1647 (cinq ans après la publication des Méditations, elapso vix quinqiiennio). La rectification a son importance : Sorbière concluait, en effet, que Gassend avait bien gardé la foi jurée, mais non pas Descartes, qui,. dans sa réponse à la Disquisitio metaphy- sica de son adversaire, aurait dépassé les bornes. « Mais », remarque Baillet, « cet homme... n'a pu ignorer que cette réponse de M. Des- B cartes, qui d'ailleurs est assez modérée, avoit été composée incontinent » après son premier voyage de France [en marge : 1644, à la fin], et » qu'elle avoit été imprimée à Paris six mois avant son second voyage » [id. : 1647], auquel il met cette fameuse réconciliation de nos deux phi- » losophes [id. : il n'eut pas le loisir de voir le monde à Paris en 1647] ; » quoique nous soyons obligez de' la remettre encore un an plus tard que » luy, pour ne nous point écarter du sentiment de ceux qui sçavent trés- » certainement qu'elle s'est faite à son dernier voyage, au mois de juillet » de l'an 1648. » (Vie de Mojis. Descartes, II, 343.)

Remarquons cependant que Mersenne, dans une lettre à Sorbière, du 5 nov, 1646, parle déjà d'une amitié contractée entre Descartes et Gas- send (ci-avant, tome IV, p. 5i5. Cf. ibid. lettre CDXXII, p. 362).

Quant à la date exacte de la réconciliation de 1648, elle est certai- nement antérieure au 27 juillet, jour où Mer'^cnne (qui fut de la fête) tomba malade. Gass'tnd, dans une lettre à Louis de Valois, datée de Paris, nonis iunij (5 juin) 1648, dit qu'il vient d'avoir la visite de Mer- senne et de quelques amis [Gass. Op., VI, 286). Venait-on préparer la prochaine réconciliation des deux philosophes ?

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