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LIVRE SECOND.

De la nature des lignes courbes.


Quelles ſont les lignes courbes qu’on peut recevoir en géométrie

Les anciens ont fort bien remarqué qu’entre les problèmes de géométrie, les uns ſont plans, les autres ſolides & les autres linéaires, c’eſt-à-dire que les uns peuvent eſtre conſtruits en ne traçant que des lignes droites & des cercles ; au lieu que les autres ne le peuvent eſtre, qu’on n’y emploie pour le moins quelque ſection conique ; ni enfin les autres, qu’on n’y emploie quelque autre ligne plus compoſée. Mais je m’étonne de ce qu’ils n’ont point outre cela diſtingué divers degrés entre ces lignes plus compoſées, & je ne ſaurais comprendre pourquoy ils les ont nommées mécaniques plutoſt que géométriques. Car de dire que c’ait été à cauſe qu’il eſt beſoin de ſe ſervir de quelque machine pour les décrire, il faudroit rejeter par meſme raiſon les cercles & les lignes droites, vu qu’on ne les décrit ſur le papier qu’avec un compas & une règle, qu’on peut auſſi nommer des machines. Ce n’eſt pas non plus à cauſe que les inſtruments qui ſervent à les tracer, étant plus compoſés que la règle & le compas, ne peuvent eſtre ſi juſtes ; car il faudroit pour cette raiſon les rejeter des mécaniques, où la juſteſſe des ouvrages qui ſortent de la main eſt déſirée, plutoſt que de la géométrie, où c’eſt ſeulement la juſteſſe du raiſonnement qu’on recherche,