Page:Descartes - Les Passions de l’âme, éd. 1649.djvu/265

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De l’orgueil.

Tous ceux qui conçoivent bonne opinion d’eux-meſmes pour quelque autre cauſe, telle qu’elle puiſſe eſtre, n’ont pas une vraie généroſité, mais ſeulement un orgueil qui eſt toujours fort vicyeux, encore qu’il le ſoyt d’autant plus que la cauſe pour laquelle on s’eſtime eſt plus injuſte. Et la plus injuſte de toutes eſt lorſqu’on eſt orgueilleux ſans aucun ſujet ; c’eſt-à-dire ſans qu’on penſe pour cela qu’il y ait en ſoy aucun mérite pour lequel on doive eſtre priſé, mais ſeulement parce qu’on ne foit point d’état du mérite, & que, s’imaginant que la gloire n’eſt autre choſe qu’une uſurpation, l’on croit que ceux qui s’en attribuent le plus en ont le plus. Ce vice eſt ſi déraiſonnable & ſi abſurde, que j’aurais