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LA MÈRE

C’est bien monotone sans doute ce cri de chaque page : « La pauvreté nous tue… J’étouffe de petits embarras d’argent qui mangent ma vie comme des mites la laine… » ; mais qu’y faire ? On ne peut pourtant pas s’intéresser uniquement et sans fin à l’objet de ses premières amours ! Il ne faut envisager cela que comme un aspect de son malheur.

1848 fut le point culminant de la crise.

C’est alors que Mme Valmore ne sait plus comment s’y prendre pour inventer leur existence. Sa pension, suspendue, a été réduite ; Hippolyte gagne quarante francs par mois comme surnuméraire à l’Instruction publique ; et quant aux journaux auxquels la conteuse propose sa copie, autant, la jeter aux moineaux !

Elle se reporte aux jours de terreur et de disette, à Douai, et songe à ce qu’a dû souffrir sa mère, « pour nourrir son pauvre petit troupeau insouciant ».

Mais pour se faire une idée de cette extrémité, ce qu’on devra lire, ce sont les lettres qu’elle adresse à son frère, « administré de l’hospice de Douai », dont cette suscription ménage l’amour-propre.

Il ne sait pas, il s’imagine, lui aussi, que la célébrité de sa sœur permet à celle-ci de lui envoyer régulièrement le denier promis. Et il est fort étonné (incrédule peut-être) d’apprendre qu’elle ne lui a pas écrit plus tôt, faute de pouvoir affranchir sa lettre !

« À quel point faut-il que je sois pauvre pour