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SONNETS-ÉPITAPHES

I

ATHÈNES


Quand, les temps accomplis, sous les faisceaux romains
Mourante, se tordait la cité de Minerve
(Car, splendeur, et génie, et grâce, tout s’énerve !),
On la vit vers le ciel tendre ses blanches mains ;

Remplissant ses palais, le port et les chemins
De soupirs cadencés, que l’avenir conserve ;
Et la muse, qui tient les grands pleurs en réserve,
Pleura longtemps Athène, idole des humains !

Ainsi, poëte, ainsi, quand, pour ton corps débile,
Sont arrivés les jours prédits par la Sibylle,
Quand pèse sur ton cœur le genou du trépas ;

Ton agonie exhale une plainte divine ;
Et les Hélas publics et ceux que l’on devine
Te font de saints honneurs que d’autres rois n’ont pas.



II

JÉRUSALEM


Quand, sous son déicide et Titus en fureur,
Jérusalem maudite eut fermé sa paupière,
Sans que du temple saint restât pierre sur pierre,
Le corps seul succomba, trop juste objet d’horreur.

Mais d’une autre existence un souffle avant-coureur,
L’âme se dégagea de cette immense bière ;