Page:Deschamps - Études françaises et étrangères, 1831, 5e éd.djvu/388

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Pour souffrir et chanter, sur la terre venu,
Tu meurs enfin… pourquoi ne t’ai-je pas connu ?
Car je les connais tous ceux qui seront célèbres ;
Leurs rayons fraternels éclairent mes ténèbres.
Je n’étais qu’un enfant (Paris, vers ce temps-là,
Pleurait avec Mathilde et riait d’Atala),
Que, du siècle où Voltaire égalait les couronnes,
Voyant encor debout les dernières colonnes,
Je fus conduit, tremblant, vers ces débris fameux,
Par mon père, vieillard, hélas ! tombé comme eux ;
C’était Lebrun, armé de sa strophe énergique,
Fougueux comme Pindare… et plus mythologique ;
Ducis, qu’on vit grandir à l’ombre d’un géant,
Brûlant imitateur, qui s’éteint, en criant ;
Chénier, poète sage, orateur téméraire,
Génie académique, immortel par son frère ;
Fontanes, qui veilla, flambeau pur et brillant,
Comme un autre Boileau près de Chateaubriand ;
Parny, qui, cinquante ans, des salons aux ruelles
Voltigeant, ne trouva ni censeurs ni cruelles ;
Delille, chef heureux d’un système tombé,
Malgré cent mille vers, plus poète qu’abbé ;