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Page:Deschamps - Marivaux, 1897.djvu/164

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CHAPITRE II

MARIANNE

Lisons la Vie de Marianne ou les Aventures de la comtesse de ***. C’est l’autobiographie d’une jeune fille que le hasard a jetée dans une condition humble et malaisée. Marivaux, précédant, par le choix de ses sujets, la lignée de romanciers que George Eliot devait plus tard représenter avec tant d’éclat, observe volontiers les existences obscures, les petites vies où s’épanouissent de jolies âmes.

La jeune et intéressante Marianne entra dans la vie d’une façon romanesque, et le récit de ses malheurs commence par un tableau de mélodrame. C’était par une sombre matinée d’hiver. La route de Bordeaux était déserte. Seule, une berline, attelée en poste, cheminait dans les ornières, entre deux rangées d’arbres dépouillés. Tout à coup des voleurs, armés jusqu’aux dents, sortirent des buissons, arrêtèrent les chevaux, et tuèrent à coups de pistolets d’arçons, toutes les personnes qui voulaient résister. Les postillons se sauvèrent. Un chanoine s’enfuit.