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le p’tit gars du colon

colères ; ni la petite croix sur le front, le soir, avant l’heureux sommeil ; ni la parole émue, la parole sainte et pénétrante qui portait vers Dieu, vos âmes, pauvres chers petits enfants.

Avec la mère s’éteignent dans la nuit du tombeau les bonheurs journaliers qui peuplent nos foyers… Pleurez, petits enfants, pleurez et priez, mais ne cherchez plus.

Eux pourtant s’imaginaient la revoir.

Novembre était arrivé, tout chargé de longs nuages qui, des jours entiers, sans lueur vive, traversaient le firmament. Ils venaient de l’ouest, étouffant le soleil dès son lever, tuant toute espérance d’un peu d’azur par dessus la plaine morne et la forêt défeuillée.

Puis soudain, sans raison, le beau temps reprenait. C’était joie naïve en leurs âmes d’enfants de courir dans le vent tiède balayant les débris morts sous leurs pas, et par dessus leurs fronts, très haut, dans le bleu qui réapparaissait, tous ces vilains nuages de larmes et d’angoisse. Alors, on allait au grand bois chasser la perdrix, rejoindre le père qu’on savait parti, dès le matin, sa hache sur l’épaule, pour l’abatis nouveau.

Mais non. Rien ne frappait l’écho.

Jadis on l’entendait, vif et sonore, le coup rude sur le tronc sec. Et l’on courait, par dessus troncs abattus et branches brisées, par dessus ravines et