Page:Desmarets - Clovis ou la France Chrétienne.djvu/156

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Quand de sexe divers deux spectres s’avancerent.
Ses cheveux à l’instant d’horreur se herisserent.
L’un have, sans couleur, et d’un sang noir trempé,
Des deux mains sur son tronc portoit son chef coupé.
L’autre est bleüe et livide ; et sa teste panchée
Porte une lourde pierre à son col attachée.
Voy, dit l’un, tes beaux faits, execrable bourreau.
De tes fieres fureurs voy l’horrible tableau.
Parricide inhumain, voy ton frere et sa femme,
Dont ta rage esteignit et la vie et la flame.
Mais sçache que mon sang est prest à nous vanger,
Par l’indomptable bras d’un espoux estranger.
Cependant, pour punir ta cruauté barbare,
Que jamais la terreur de toy ne se separe.
Sa bouche alors lança deux infames serpens,
Qui dé-ja sur son lit, et par son sein rampans,
Le mordent, et dé-ja le percent jusqu’à l’ame.
Il se trouble, il s’éffraye, il fremit, il se pasme.
Mais l’effroy le réveille. En vain il veut crier.
Son impuissante voix s’attache à son gosier.
Au deffaut du parler, il se debat, il tremble.
Il pousse des sanglots, et gemit tout ensemble.
Tous les siens à son ayde accourent à ce bruit.
Il craint encor le spectre. Il le cherche, et le fuit.
Son œil hagard revoid ces terribles visages :
Ou du moins sa memoire en revoid les images.