Page:Desmarets - Clovis ou la France Chrétienne.djvu/437

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Prenant le party foible, armé de la raison,
Contre un party nombreux qu’arma la trahison.
Il pretend quelque jour payer avec largesse
Et sa rare valeur, et sa haute sagesse.
Mais, dit-il, dans mon cœur j’ay mille ennuis secrets,
De ne pouvoir donner que de tristes regrets
A cent nobles martyrs, dont les fidelles flames
Pour Christ et pour leur prince ont prodigué leurs ames.
Car j’entendis ces cris : mourons dans nostre loy :
Mourons pour Jesus-Christ ; mourons pour nostre roy.
Clotilde à ce discours éprise d’un saint zele,
Veut honorer les corps de la troupe fidele :
Sent son cœur enflammé du desir de les voir.
Le prince veut la suivre en ce pieux devoir ;
Et luy donnant la main, part de l’heureuse roche.
La reine avec respect du triste lieu s’approche.
Elle void le spectacle et pitoyable et doux.
Aussi-tost pres d’Argine elle tombe à genoux :
L’embrasse, et son amant ; et de sa bouche pure,
Avec de saints baisers presse chaque blessure.
Le duc suit son exemple. Elle voudroit encor
Ramasser tout leur sang en de grands vases d’or.
Clovis en ce desir veut la rendre contente :
Et parmy les tresors renfermez dans sa tente,
Fait choisir cent vaisseaux d’or pur et ciselé,
Pour recueillir le sang qui pour Christ a coulé.